
Décidément, on ne m’arrête plus. Je suis une machine. Un animal. Nous sommes le 23 janvier et j’en suis déjà à mon troisième livre pour le #ChallengeLecture2018 des éditions J’ai Lu. Il est sans doute un peu tôt pour faire péter le Champomy, mais on approche de l’exploit !
Et après deux classiques, j’ai cédé aux sirènes de la modernité avec « Autobiographie de l’auteur en coureur de fond » d’Haruki Murakami. Autrement dit : l’autobiographie d’Haruki Murakami en coureur de fond.
Né au japon, en 1949, Murakami décide de devenir écrivain en regardant un match de baseball. Après le succès critique de son premier ouvrage (Écoute le chant du vent, publié en 1979), Haruki décide de vendre le club de jazz dont il est le propriétaire pour se dédier corps et âme à sa nouvelle carrière : auteur de livre à succès (et potentiel futur nobélisable selon les personnes autorisées à penser qu’elles sont dans les milieux autorisés). Fumant 3 paquets par jour et changeant littéralement de mode de vie, Murakami décide de se mettre sérieusement à la course de fond pour éviter de s’empâter, puisqu’il fait partie de ces personnes qui, comme moi, ont un métabolisme lent. Bref, un esprit sain dans un corps sain… même s’il trouverait sans doute à redire à cet adage. Mais on y reviendra.
L’ouvrage commence donc le 5 août 2005. Murakami vient d’arriver à Hawai et ouvre ainsi une sorte de journal qui nous fait suivre sa préparation pour le célèbre Marathon de New-York qui aura lieu en novembre de la même année. L’occasion pour lui de revenir sur sa vie de coureur de fond.
Je vous avouerais que, quitte à choisir un livre traitant de sport, le fan de Formule 1 que je suis aurait eu beau jeu d’étoffer sa culture personnelle d’une biographie d’un champion du monde retraité telles que celles d’Alan Jones ou encore Jenson Button. Et pourtant, c’est vers la course à pied que ma curiosité s’est tournée : un sport qui suscite chez moi autant d’intérêt que de rejet. Il faut dire que les heures passées à faire de la course d’endurance dans la cour du Collège Emile Zola de Sotteville-Lès-Rouen, sous la houlette de M. Petrovski et consorts, n’ont pas forcément créé, chez moi, les conditions d’une adhésion, ne serait-ce que partielle, au concept de course à pied. Et pourtant, de tous les sports que le néo-licencié de la Fédération Française de Randonnée que je suis pourrait vouloir pratiquer, la course à pied est sans doute de ceux qui me siérait le mieux.
Après cette modeste course, un dimanche de début d’automne, nous rentrions tous chez nous, nous revenions à notre vie ordinaire. Et dans la perspective de la compétition suivante, nous allions sans doute, là où nous vivions, nous remettre à notre entraînement silencieux. D’un point de vue extérieur, une telle existence peut paraître insignifiante, inutile ou vaine, ou même tout à fait improductive, mais pour moi ces jugements n’ont aucune importance. Peut-être, en effet, ne s’agit-il que d’actions qui ressemblent, comme je l’ai écrit plus haut, à la tentative de puiser de l’eau à l’aide d’un vieux seau percé ; pourtant, les efforts mis en œuvre ont une réalité qui subsiste. […] Ce qui pour nous est le plus important ne se voit pas avec les yeux (mais se ressent avec le cœur).
En effet, la course à pied est, selon moi, l’un des rares sports qui permette véritablement de rencontrer à la fois son corps et son esprit. La lecture de cette autobiographie m’a conforté dans cette idée et j’avoue que ce livre de 180 pages se serait allègrement passé d’une bonne trentaine d’entre elles. Murakami écrit plus ou moins ce que tout coureur de fond pourrait écrire, avec style évidemment (mais pas trop) et malheureusement avec quelques digressions qui n’apportent strictement rien au lecteur.
Mais, à vrai dire, ce n’est pas forcément ce que je cherchais dans ce livre. Ce qui m’intéressait était de savoir quelle influence avait la course à pied chez l’auteur qu’est Haruki Murakami. Ainsi, lorsqu’en en terminant avec la page 24, l’auteur m’avoua que lorsqu’il court, il ne pense « à rien qui vaille la peine d’être noté », mon for intérieur a lâché un : « Eh merde ! Il reste encore 156 pages. »
Et pourtant, les parties les plus intéressantes de cette autobiographie sont celles où l’auteur nous parle d’écriture, distinguant le processus mental de création, du processus physique qui consiste « à mettre en forme un livre entier ». Bref : après les boulistes et les joueurs de poker, les écrivains auront peut-être un jour les honneurs d’une reconnaissance olympique. Pour Murakami, l’écriture nécessite en effet que l’auteur mette en œuvre toute son énergie physique et « bien des fois qu’il aille jusqu’à se surmener ». Selon lui, l’écriture exige deux qualités que l’on retrouvera subtilement mises en avant dans les parties davantage consacrées à la course à pied : la concentration et la persévérance.
Et finalement, plus qu’une comparaison entre les deux activités, d’apparence opposées, plus que d’essayer de nous montrer comment l’un influe sur l’autre, Murakami met simplement sur un pied d’égalité l’écriture et la course à pied autour de la notion de talent, dont chacun est plus ou moins richement doté, mais dont la persévérance et la concentration peuvent permettre à chacun de fournir les efforts nécessaires pour, l’espace d’un instant, exprimer son plein potentiel.
Et c’est finalement ce qui rend ce livre très agréable : contrairement à ce que j’en attendais – à tort -, Murakami ne cherche en aucun cas à tisser un lien artificiel entre ces deux activités qui contribuent tout simplement à son équilibre. En effet, pour lui, les écrivains sont des gens qui ne sont pas sains, mentalement parlant, ce qui nécessite, pour parvenir à ce fameux équilibre, de mener une vie saine.
Finalement, je ne sors pas de cette lecture réconcilié avec les courses d’endurance – Merci M. Petrovski et consorts -, mais la graine d’écrivain que je prétends être, y aura trouvé de quoi se nourrir.
2 défis réalisés sur 40, dans le #ChallengeLecture2018 :
- Un livre traitant de sport
- Un livre dont l’auteur est d’une origine différente de vous